Un homme de 20 ans présentant un coma et une cyanose centrale a été amené aux urgences 1 heure après avoir ingéré 21 g de nitrite de sodium contenus dans une « trousse de suicide » achetée en ligne que sa famille a retrouvée; la trousse incluait une échelle de mesure, un flacon pour la dissolution dans l’eau et des antiémétiques (métoclopramide et famotidine). La fréquence cardiaque du patient était à 60 battements/min, sa tension artérielle systolique, à 80 mm Hg, sa température corporelle, à 36,5 °C et sa saturation en oxygène mesurée par oxymétrie de pouls (SpO2) était à 85 %, malgré une oxygénation au moyen d’un dispositif supraglottique avec une fraction d’oxygène inspiré (FiO2) à 1. Nous avons observé une pâleur des conjonctives, des lits unguéaux et de la paume des mains. Le sang artériel était foncé, de couleur chocolat (figure 1A). Après une réanimation liquidienne et l’instauration d’un soutien vasopresseur, nous avons intubé le patient. Nous avons effectué une décontamination par lavage gastrique et charbon activé (1 g/kg) au moyen d’une sonde orogastrique. Nous avons administré du bleu de méthylène en traitement empirique (1 mg/kg) par voie intraveineuse. Le taux de méthémoglobine du patient a plus tard été mesuré à plus de 29 %, limite supérieure pour notre laboratoire. L’état clinique du patient s’est amélioré au cours des heures suivant l’administration d’une dose totale de 4 mg/kg de bleu de méthylène; aucune hémolyse n’a été notée. Il était alerte et bien orienté au moment de recevoir son congé des soins intensifs, 2 jours plus tard.
Il est facile de se procurer du nitrite de sodium en ligne puisqu’il est utilisé pour la conservation des viandes et comme réactif pour les laboratoires. Il oxyde le fer ferreux de l’hémoglobine en fer ferrique et l’empêche ainsi de se lier à l’oxygène, ce qui nuit à l’oxygénation des tissus1. La dose létale de nitrite de sodium se situe entre 0,7 g et 6 g. On peut soupçonner son ingestion chez les patients comateux hypoxémiques dont le sang est de couleur chocolat et qui ne répondent pas à l’oxygénothérapie; les oxymètres de pouls sont calibrés à des longueurs d’onde spécifiques pour l’oxyhémoglobine et la désoxyhémoglobine seulement2,3.
Une récente augmentation des ingestions intentionnelles de nitrite de sodium et des décès par empoisonnement a été rapportée dans plusieurs pays, y compris au Canada2,4,5. Le phénomène a été associé à des sites Web qui en préconisent l’utilisation pour le suicide et qui vendent des trousses à cette fin2,5. Au Royaume-Uni, les fournisseurs de nitrite de sodium doivent désormais refuser les « transactions douteuses », lorsque les gens paient comptant ou semblent nerveux2,6. Au Canada, il faudra améliorer la formation des employés et les contrôles juridiques pour restreindre la vente du nitrite de sodium et bannir les sites Web dangereux.
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Footnotes
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